TOI ÉCRITE
Blason du corps de la femme.

BAVARD

Au commencement, je m'imprègne de toi. Je suis une éponge. Je veux connaître chaque parcelle de ton corps.

Pour faire connaissance, je t'examine, te scrute, t'explore, te soupèse, te cerne. Te regarder jusqu'à plus saoul. Pour faire connaissance, je te décortique, te dissèque, te numérise, t'ingurgite. Te rentrer dans ma mémoire. Et pour cela aussi, je t'effleure te touche te caresse et t'étreins. Tu es divisée en quartiers, en arrondissements en rues. Ce morcellement me permet de te restituer en un tout. Tu es mon puzzle. Je n'ai pas l'utilité d'un plan, je veux me perdre. C'est en te parcourant que je veux apprendre à te connaître, me familiariser, t'apprivoiser. Et je t'apprends par coeur pour te reconnaître les yeux fermés.

Quand tu n'es pas là, pendant ces laps de temps déjà vides de ton éloignement, je révise, je répète, me remémore. Car tu n'es pas toujours évidente.

Tes mains qui me touchent, la douceur de tes gestes quand tu t'occupes de nous, c'est tout. La rougeur de ton visage dans l'amour, les petites gouttes de sueur au-dessus de ta lèvre supérieure quand tu es émue, ton parfum, ton odeur , le volume de tes seins et de tes fesses, avec mes yeux mes mains mes lèvres et mon nez, j'en prends la mesure.

Car il faut qu'un jour, toi disparue, je puisse te reconnaître sans même te voir. Il faut aussi qu'un jour, définitivement sortie de mon existence, j'ai assez de souvenirs pour continuer de vivre.

Je n'y suis pas parvenu.

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